Moncef Guitouni

La crise, une occasion de renouveau

Extrait de la conférence du 18 février 2009

Moncef Guitouni, Psychosociologue et auteur du livre L’intelligence émotionnelle et l’entreprise 

Il y a 20 ans, nous assistions à la chute du mur de Berlin, un événement associé à la fin du communisme comme modèle de développement économique et d'organisation sociale et politique. Le départ de Georges Bush de la Maison Blanche marquera-t-il de manière tout aussi éclatante, la fin du néo-libéralisme qui avait depuis 1989 constitué le modèle de développement? L'ampleur des différentes mesures adoptées en trombe par les gouvernements des porte-étendards du néo-libéralisme, États-Unis et Royaume-Uni en tête, pour rétablir la confiance perdue dans les marchés financiers et économiques, porte à croire que nous sommes arrivés à cette croisée des chemins.

La faillite d'un système ou d'une idéologie démontre comment on peut, par manque de vigilance, par un silence ou une apathie, laisser faire les choses devenant ainsi complice des événements malgré nous. L'aspiration, de par le monde, à réaliser les images paradisiaques du rêve américain, nous rend perméables aux belles paroles des chantres mercantiles de toutes sortes, dans l'espoir d'accéder à la richesse sans effort. L'égoïsme, le goût du plaisir et la passion de vivre l'instant ont, par ailleurs, transformé les repères en matière de moralité sociale et humaine.

Au-delà de cette nouvelle donne, au-delà du choc causé par ces événements aux adeptes de la "main invisible" du marché, au-delà de la réjouissance qu'elle provoque aux adeptes de la "simplicité volontaire", comment cette crise constitue-t-elle une occasion de renouveau pour le citoyen, parent ou éducateur?

Quelques pistes

Ce renouveau passe par la réappropriation d'un certain équilibre. Comme l'indique l'American Way of Life, la finalité actuellement recherchée est l'atteinte d'un stade où l'on peut faire tout ce que l'on veut, sans égard aux conséquences humaines ou financières. Ce processus remet en cause la notion même du développement durable. En effet, comment peut-il en être autrement alors que nous sommes pressés à satisfaire tous nos besoins sans égard à notre capacité de payer ou au délicat maintien de l'équilibre écologique. Pour accéder à certain équilibre, n'y aurait-il pas lieu de s'interroger sur la possibilité de nous libérer de la dépendance à l'origine de notre soif de consommation à outrance?

Cette gourmandise insatiable et l'orgueil qui freine la capacité de réfléchir et d'analyser désamorcent notre vigilance comme contrepoids essentiel au bon fonctionnement des interactions humaines et des institutions démocratiques. La crise actuelle nous oblige à nous transformer pour retrouver une qualité humaine; une capacité de bâtir et de préparer notre avenir et celui de nos jeunes pour éviter la répétition de ce dérapage.

Autre référence: Article paru dans la revue Jeune Afrique